Sonja Weilgart-Whitehead

Il suffit d’ajouter de l’eau

« L’échec n’existe pas, sauf si l’on arrête d’essayer ». Elbert Hubbard

En tant qu’adolescente de 17 ans à Halifax en Nouvelle-Écosse, atteinte à la naissance d’une tétraplégie cérébrale spastique, le fait de mener une vie active m’a permis de conserver ma mobilité et de continuer à marcher, ne serait-ce que jusqu’au prochain coin de rue avec beaucoup de difficulté et à l’aide d’une marchette. Je suis membre d’une équipe de natation et je fais de l’équitation thérapeutique et du vélo. Récemment, j’ai aussi fait du bateau à voile et du ski alpin, et j’ai joué au hockey sur luge. Par le passé, j’ai tenté l’escalade, le ski nautique et le canoë, et j’ai joué aux quilles, au boccia, ainsi qu’au rugby, au ballon-panier et au volleyball en fauteuil roulant.

Je suis maintenant en 11ième année en immersion française, et je consacre toute mon énergie à la natation compétitive. Jusqu’à récemment, j’étais le seul membre de l’équipe ayant un handicap. J’adore surprendre les gens en marchant avec difficulté vers l’eau avec ma marchette : je plonge dans l’eau puis je nage à toute allure pendant que les gens me regardent, bouche bée. Parfois, à la fin de mes courses, les spectateurs applaudissent spontanément, se mettant même debout. Je suis tellement touchée et inspirée par cela, ça me fait comprendre que tout est possible avec un tel soutien. Récemment, j’ai été choisie pour un événement de paranatation à Montréal, ainsi que pour des épreuves contre-la-montre pour les Jeux du Canada 2013. Je me suis classée au rang S4 en tant que paranageuse, et il n’y a que 8 paranageurs plus handicapés que moi au Canada. La natation a vraiment rehaussé mon sentiment de confiance et de ne rien avoir à mon épreuve, ainsi que les avantages que confèrent le travail ardu et la persistance.

La natation me donne un sentiment de liberté puisque je suis tout à fait autonome dans l’eau. L’été dernier, j’ai nagé plus de 1200 m pendant près de deux heures sans arrêt, traversant un lac dans les deux sens. Après, une femme a disputé ma mère : « Vous ne trouvez pas que vous exagérez? » Une autre fois, une femme a tenté de me « sauver la vie » à l’aide d’un flotteur spaghetti, malgré les assurances répétées de ma mère que j’étais en toute sécurité. Ces incidents démontrent les préjugés et les fausses idées qui persistent au sujet de l’activité physique et les personnes ayant un handicap.

Je suis plus active que nombreux de mes camarades de classe non handicapés, peut-être à cause des 2 heures de réadaptation spéciale (appelée « pédagogie conductive ») que j’ai dû faire tous les jours depuis l’âge de 18 mois pour soigner ma paralysie cérébrale.

L’activité physique fait du bien à tout le monde, mais pour les personnes ayant un handicap, elle est absolument essentielle. Les personnes atteintes de ma maladie souffrent de rigidité musculaire et nous serions incapables de bouger sans demeurer actives. Nous perdrions la fonction, la liberté et l’autonomie que nous désirons. Le fait d’être active me permet d’échapper à mes devoirs et de reposer un peu mon cerveau. C’est une bonne activité sociale aussi, puisque je rencontre d’autres et que je passe du temps avec eux. C’est amusant et thérapeutique en même temps. Je croise encore des professionnels de la santé qui ne voient pas l’utilité de continuer à m’activer et à rester debout. Pourtant, on devrait toujours continuer à bouger autant que possible. On s’en sert ou on le perd! Évitez d’utiliser le fauteuil roulant à moins d’être pressé ou d’avoir une grande distance à parcourir, sinon vous risquez de grossir et de devenir trop confortable, paresseux et affaibli. D’après moi, si la chirurgie orthopédique que j’ai subie il y a presque 2 ans a connu tant de succès, c’est en partie parce que j’étais vraiment en forme auparavant (la pré-adaptation, selon mon physiatre) and que mon niveau d’activité a rehaussé les avantages de la chirurgie.

L’activité physique m’a permise de réduire autant que possible mon utilisation du fauteuil roulant et m’encourage à croire que je peux transformer ma propre vie ainsi que celle des autres. Elle m’inspire à profiter pleinement de la vie. On ne connaît pas ses limites sans les explorer! Avec une bonne attitude, de la détermination, et du soutien, tout devient possible.